On croit souvent que Miami est une ville de rêve; des plages à perte de vue, des boutiques branchées, etc… Oui, c’est bien l’impression que cet endroit donne à ses habitants et à ses vacanciers. Pourtant, lorsqu’on est policier dans cette ville, on commence à en voir les mauvais côtés. Franck Kelnas venait de vivre une journée des plus épuisantes. Il y avait d’abord eu une dispute conjugale dans le nord de la ville (laquelle s’était presque terminée en bain de sang) puis, quelques alertes de trafic de drogue ici et là, pour finir par l’arrestation d’une femme ivre qui roulait en sens inverse sur l’autoroute. Autant dire que le policier n’avait qu’une seule envie; terminer son service au plus vite! Pour le moment, il était dans un petit bureau du commissariat et feuilletait les dossiers judiciaires d’un groupe de jeunes qu’il venait tout juste de mettre en cellule. Tous mineurs, ils s’étaient faits prendre en train de s’enfiler des shooters dans un petit bar miteux. Leurs dossiers étaient peu remplis cependant. Ce n’était qu’un groupe d’écervelés qui avaient voulu s’amuser pendant une nuit. Ils seraient sûrement relâchés le lendemain matin.

Une sonnerie provenant de sa montre détacha le regard de Franck des dossiers. Enfin! 23h00! L’heure bénite où son service prenait fin. Il jeta les documents pêle-mêle sur le bureau et passa dire bonsoir à ses collègues. Contrairement à ses habitudes, il ne retira pas son uniforme. Celui-ci avait été sali pendant la journée et il devait le rapporter à l’hôtel pour le laver. Eh oui, Franck habitait dans un hôtel! C’était une mesure temporaire en attendant de se trouver un logement, par contre. L’hôtel, c’est bien, mais c’est cher. Et avec un salaire de policier, on ne va pas bien loin. Un vent frais et un ciel noir accueillirent Franck à sa sortie du bâtiment. Il s’arrêta sur le seuil de la porte et entreprit d’allumer une cigarette. Malheureusement, il n’eut pas le temps de le faire.

Une jeune fille courut dans sa direction et le serra fortement. Surpris, le policier ne bougea pas d’un seul poil. En fait, tout ce passa très rapidement. Son esprit enregistra chacune des paroles de l’adolescente, sans vraiment les comprendre tout à fait. Au bout du compte, Franck n’avait toujours pas réagit lorsqu’elle fondit en larmes. Le policier avait été entraîné à beaucoup de situations : poursuites à pied, prise d’otage, filature… mais, côté psychologie, il avait du chemin à faire. Il vint s’asseoir à côté de l’adolescente, ne sachant toujours pas quoi dire. Elle semblait tellement secouée et malheureuse que cela mit Franck encore plus mal à l’aise. Finalement, il se décida à parler. Ce n’était certainement pas la meilleure chose à dire mais, il ne fallait pas trop lui en demander :

- Est-ce que je peux faire quelque chose pour vous aider?

Articula-t-il avec douceur, tout en passant son bras autour des épaules de la jeune femme.
Il l’étreignait gentiment, d’une manière qui ne lui ressemblait pas en fait. Il avait l’impression qu’un autre Franck venait de prendre la relève. Pas le Franck pervers et manipulateur, le Franck attentionné et maladroit qui ne s’était pas montré depuis des années.

- Où habitez-vous? Je peux peut-être aller vous reconduire?

Reprit-il en adoucissant encore plus le ton de sa voix. Il ne se reconnaissait plus. Depuis quand est-ce qu'il vouvoyait? Et d'où lui venait cette soudaine douceur? Il n'en avait aucune idée et il s'en fichait. Tout ce qui lui importait c'était de réconforter l'adolescente.

OK par Cash