William A. Hellwood.
~ (= Give The Pain With The Finger-) ~

Ma proie marche lentement, sous la pluie, une bible dans une main et un chapelet dans l'autre. Les gouttes s'écrasent contre son pardessus noir d'où dépasse la tenue réglementaire des prêtres catholiques. L'averse m'oblige même à rabattre ma capuche sur ma tête. Je préfère largement la garder en arrière, pour éviter de faire peur à mes proies mais là... Enfin, de toute manière, au point où en est la traque, je peux tout de même me permettre ce geste.

Au fait, je ne me suis pas présenté : William Artur Hellwood, libraire le jour et tueur la nuit. N'allez pas vous enfuir tout de suite en croyant que je suis un fou, tuant n'importe qui n'importe quand et surtout, n'importe comment. Non non... Je suis un "professionnel" dans la matière. Je ne tue que les coupables. La mort n'intervient de ma main que sur les personnes qui ont commis quelque chose d'affreux, la même chose qui les emmèneras six pieds sous terre. Le meurtre. Bien entendu, je ne tue pas TOUT les meurtriers que je rencontre. Il y en a pour lesquels le meurtre est un moyen de vivre. Légitime défense notamment. Je ne vais pas tout vous expliquez, ce serait trop long et trop ardu, mais je tiens juste à vous dire que je ne suis pas une foutu sous merde pas capable de camoufler son crime correctement, et qui plus est en butant de pauvres innocents. Je traque ces types. J'ai ça dans le sang. C'est mon "hobby". Je ne peux m'en empêcher, alors pourquoi ne pas s'en servir à bon escient ? Tuer des tueurs me semble juste.

Le prêtre, c'est John Mazerzky. Un pédophile tueur de mômes trop malin pour se faire avoir par les flics, et trop bête pour m'échapper. Il faut dire que j'ai l'habitude de repérer les types comme moi. Et grâce à mon ami le Hacker, trouver plus de preuves en faisant un tour dans le bunker informatique des flics de New-York, c'est simple comme bonjour. C'est une véritable chasse, plus vrai que nature, dans une ville sombre et emplit de vices. Je connais souvent mes proies en allant voir les criminels de tout bord dans les quatre coins de la ville. Je discute tranquillement avec eux, et les histoires de meurtres non résolus où carrément non connus sont lâchés plus vite qu'une flamme brûle une allumette. Bref. Mazerzky a réussi à ne pas se faire avoir par les flics en dissolvant les corps avec de l'acide. Le hic pour lui, c'est qu'une de ses proies s'était échappé en sautant du coffre de sa voiture, alors qu'il l'emmenait chez lui. Le petit avait eu une sacré chance, et, par hasard, le premier homme sur lequel il tomba, ce fut moi. J'avais alors décidé de l'emmener à l'hôpital lorsque, pendant le chemin, il me raconta d'une voix horrifié son enlèvement près de son école. Je lui avait raconté alors que j'étais un flic et qu'il ne devait en aucun cas faire écho de cette histoire à quelqu'un. Il parut rassuré quand il sut que j'allais aller l'arrêter, et il avait acquiescer. Je l'avais ensuite déposé devant l'hosto.

J'avais eu de la chance. Et j'étais proche d'un nouveau succès.

Le prêtre s'arrête un instant à un carrefour pour vérifier l'heure sur son portable. Même les prêtres suivent la technologie ? Bah putain... Je m'arrête aussi, prenant soin de me cacher sous un porche avant qu'il reprenne sa marche et que je le suive silencieusement. Je savais déjà où il allait pour l'avoir déjà filé quelques fois à cette heure-ci : Chez lui. Bon okay, c'est con mais bon... John Mazerzky partait peu après minuit de l'église du quartier pour aller s'endormir chez lui. J'avais déjà forcé son vieux studio déglingué et j'avais remarqué que son lieu d'habitation était l'exact contraire de ce que l'on voyait de lui. Un petit espace remplit d'un bordel monstre, de la poussière sur les meubles, des araignées immondes dans les coins sombres du plafond, peu de lumière... Contrairement à lui même, quelqu'un de gentil, ordonné et très sociable. Je connaissais donc une partie de la face caché du tueur...

Je le suis pendant cinq petites minutes avant qu'il ne tourne sur sa droite pour monter l'étroit escalier de l'appartement où il réside. J'attends moi même quelques minutes de plus devant, sous la pluie glaciale que j'apprécie tant, avant de monter à mon tour. Je monte au cinquième avant de m'arrêter derrière la porte et de rabattre ma capuche en arrière, affichant un demi-sourire en sortant de ma veste à capuche une enveloppe tâchée. C'est mon leurre. Comme je sais qu'un habitant de New-York est toujours sur ses gardes, quand je toquerais, il sera obligatoirement amené à regarder dans l'œillette de la porte pour voir l'importun. Je toque donc, avant d'attendre une minute jusqu'à ce que ma proie n'apparaisse devant moi. Je souris plus largement, je suis près du but.

De ma manche droite, je sors une seringue que j'enfonce rapidement dans son cou, avant de le pousser avec moi à l'intérieur de son appartement. Je referme la porte sans un bruit tout en gardant un œil sur mon invité de la nuit qui tourne déjà de l'œil. Le sérum l'endors dans la minute qui suis. J'enlève la seringue que j'avais oublié de reprendre dans ma précipitation pour entrer, puis je sors de mon sac à dos tout l'attirail de mon jeu mortel ; de grandes bâches en plastique, des sacs poubelles, une petite mallette et une scie électrique. Je positionne les bâches pour recouvrir une grande partie du salon qui pourrait être sujette aux projections de sang -imaginez, tous les meubles recouvert d'une bâche, même le sol...- , puis j'amène le corps du prêtre pour le déposer sans ménagement sur la grande table. C'est apparemment le seul meuble de son appart' qui ne soit pas sale et remplit de trucs immondes. J'attache ensuite consciencieusement ma proie avec un gros rouleau de scotch épais, puis je dispose sur son canapé tout mes outils de "travail" sortis de ma mallette -Scalpel, couteau... Toutes sorte de choses en faites, même si je ne les utilisent pas tous- , plus bien entendu ma scie.

[...]

Quinze minutes plus tard, le prêtre se réveille, déjà effrayé. Je le regarde dans les yeux, pendant qu'il cherche un moyen de s'échapper, un moyen qu'il ne trouvera malheureusement jamais. Il ne peut crier, à cause du scotch que je lui ai collé sur sa bouche, aussi il tente vainement de crier, mais ce n'est qu'un léger son étouffé qui me parvient. Pour lui faire comprendre qu'il vaudrait mieux qu'il la ferme, j'approche de son œil droit un scalpel. A sa vue, ma proie se tétanise et n'émet plus aucun son.

- Voilà John... Reste tranquille.

D'habitude, j'aime bien faire un petit speech où je lui explique le pourquoi du comment, la raison pour laquelle il va mourir. Généralement, je laisse ma proie parler un peu avant de le faire taire à tout jamais. C'est ma manière de lui laisser quelques mots de fin. Mais là, je ne peut pas le laisser parler, au cas où il se mettrait à crier, vu que à cette heure là, la plupart de ses voisins doivent être en train de dormir paisiblement. Un cri et s'en serait finis de mon plan.

Je prend donc ma scie électrique et, d'un mouvement parfaitement cinématographique, je lui coupe la tête lentement. John est sujet à des soubresauts, comme toutes les personnes qui sont passés devant moi dans cette position. J'arrête mon mouvement quand la tête est proprement découpé, puis je regarde avec satisfaction le flot de sang qui coule sur la bâche qui recouvre la table. Magnifique.

Mes yeux s'entrouvrirent avec difficulté. Je baillais longuement avant de me frotter les yeux avec mes poings serrés. Je m'assis sur mon lit avant de re-bailler. J'avais cru rêver ou j'avais vraiment entendu ce... cri ? Je me levais alors, serrant dans mes bras mon nounours préféré. J'ouvris la porte doucement avant de continuer ma marche nocturne dans la maison. En bas, j'entendais des exclamations étouffés. Je descendis les escaliers sans faire de bruit pour constater qu'il n'y avait personne dans le salon, et que les bruits semblaient venir de derrière la porte blanche.

Papa m'avait toujours interdit d'entrer dans cette salle, et je l'avais toujours écouté. J'étais curieux de connaitre l'origine du bruit, et même de savoir si c'était mon père où non -je n'avais pas peur, car ce genre d'émotion m'était étranger- . Je traversais donc le salon avant de m'approcher très près de la porte et de poser mon oreille sur le battant. J'entendis un sifflement métallique et un petit grognement que j'identifiais comme être de la douleur. Je glissais ma main vers la poignée et je l'ouvris lentement.

Ce que je vis fut pour moi une révélation. Du sang, partout. Je voyais une pièce toute blanche, pratiquement vide, si ce n'est une grande table et un petit bureau en son centre. Toute la pièce était recouverte de bâches transparentes où le sang était pratiquement omniprésent. Sur la table, je voyais un homme blond, dont chaque membre semblait être séparé des autres. A côté, il y avait mon père, un tablier de médecine sur lui, le sourire aux lèvres, observant son œuvre d'un air satisfait.

Bizarrement, je ne fus pas stupéfait, ni horrifié. Je fus moi même fasciné par ce liquide rouge qui coulait partout, dont les éclats écarlates frappaient chaque mur à leurs façons. Juste à ce moment là, mon père tourna le regard vers moi. Ses yeux s'agrandirent d'un coup, puis il courut vers moi.

Il me ramena en vitesse dans ma chambre, me posa délicatement sur le lit avant de me dire d'attendre là jusqu'à qu'il revienne. J'obéis, cherchant à me remémorer encore une fois la scène que je venais de vivre. Depuis quelques années déjà, je ressentais une attirance pour les blessures que je pouvais voir dans la vie de tout les jours. J'avais déjà tué quelques animaux, pour découvrir la composition de leur corps. Je n'aimais pas forcément faire mal, mais j'aimais déjà tuer.

Quelques minutes plus tard, mon père apparut sans son tablier. Il avait nettoyé son visage qui ruisselait du sang de sa victime une dizaine de minutes plus tôt. Il s'arrêta un instant en m'observant d'un œil songeur, puis il vint s'asseoir à côté de moi.

- Tu n'as pas eu peur William ?

Peur ? Je n'avais jamais eu peur de ma vie.

- Non papa.

- Qu'est-ce que tu as senti en voyant le sang ?

- Ça m'a attiré.

Je le regardais, ayant tout de même l'idée de ne pas lui en dire trop, pour ne pas l'horrifier. Il devait me prendre pour un monstre sans sentiment...

Mon père me regarda, et je vis qu'une larme perlait au coin de son oeil.

- Pourquoi tu pleures papa ?

- Parce que tu es comme moi mon fils.

En réalité, mon père avait compris que j'étais un futur tueur. Un être qui aurait besoin de sa dose de sang. Un monstre sanguinaire qui ne pourrait s'empêcher d'assassiner des gens. Plus tard, il m'expliqua qu'il avait commencé comme je l'avais fait, en tuant de petits animaux pour découvrir. Son premier meurtre, c'était un russe, un mafieux qui avait assassiné un jeune ami à mon père. Ca avait été un gros foutoir, mais au fil du temps, il perfectionna sa chasse pour être pratiquement indécelable. Il m'enseigna tout cela avec soin, en veillant à ce que je ne tue pas d'innocent. Il souhaitait que je me sente comme lui : non coupable. Il m'appris aussi à cacher ce que je pensais vraiment et à m'inventer des fausses émotions pour me fondre dans la masse. Il m'appris à traquer des proies, à filer quelqu'un sans qu'il ne s'en aperçoive, à mettre au point quelques pièges et à ne jamais laisser d'indice.

Mon premier meurtre, je m'en souviendrais toute ma vie. J'avais dix-huit ans ce jour là. C'était un peu comme un cadeau d'anniversaire que mon père me faisait. Il avait capturé une vieille femme, une infirmière qui tuait avec lenteur des patients de l'hôpital dans lequel elle travaillait à l'aide de médicaments mal dosés. C'était pour moi un baptême, que je réussis avec succès, malgré la nervosité dont je faisais preuve juste avant le coup mortel. Mon père n'était pas fier de moi, car j'étais comme lui, un meurtrier qui ne pourrait jamais s'arrêter, mais il fut heureux de voir que j'appliquais ses idées avec soin et détermination. J'éliminais les assassins.

Arthur Junior est mort lorsque j'eus vingt et un ans. Il s'éteignit tranquillement à la suite d'une maladie grave. Il me pria juste avant de mourir de continuer à être bon et à ne tuer que des coupables. Je ne devais en aucun cas éliminer des innocents. J'héritais de quelques dizaines de milliers de dollars qu'il avait pu mettre en banque, de notre grand loft à Staten Island et de ses idées.

Avec l'argent, j'ouvris une librairie dans Manhattan, que je baptisais "Artorius Librabry". J'avais poursuivi mes études jusqu'à avoir un diplôme de lettre et d'histoire. J'étais désormais prêt à démarrer une nouvelle vie, une vie d'adulte.

Depuis mes vingt et un ans, je n'ai jamais eu de problèmes avec la police pour ce que je fais. J'ai assez d'argent pour subvenir convenablement à mes besoins et j'aime ma vie, tout simplement. J'ai quelques amis, j'ai eu quelques petites copines qui m'ont fait découvrir une facette que je ne connaissais pas. Tout va bien.

Et vous, qu'est-ce que vous avez fait dernièrement ?